jeudi 29 août 2019

Mikado d'enfance

Gilles Rozier, L'antilope, 192 pages

Présentation de l'éditeur:

Quarante ans après les faits, le narrateur revient sur un épisode traumatisant de son enfance : l’exclusion de son collège, pour avoir adressé, avec deux camarades, une lettre antisémite à son professeur d’anglais.
Quelques années plus tard, le narrateur, fils d’une mère juive et d’un père catholique, deviendra spécialiste de culture juive. Que s’est-il passé entre ces deux moments de son histoire ?
Le narrateur tente de décortiquer l’imbrication des conflits politiques des années 1970 et des malaises familiaux. Il retrouve cette question tragique que sa mère a posée devant le conseil de discipline : « Comment voulez-vous que mon fils soit antisémite alors que mon père est mort à Auschwitz ? »
Gilles Rozier continue de creuser l’identité juive et ses enjeux, au plus profond de l’intime
.

 




Extrait du roman


Sur son visage, un sourire à peine esquissé. De la tristesse dans son regard. On me le dit encore : j’ai une tristesse dans la pupille dont je ne parviens pas à me départir. Car lui, c’est moi. Enfin pas tout à fait. Un moi à plus de quarante ans de distance, un collégien dont je ne me souviens guère, un garçon encore niché auquel je n’ai plus vraiment accès. Il s’est perdu dans le lointain pays de l’enfance, dans l’épais brouillard des années passées. Elles se sont agglomérées les unes aux autres et ont laissé une masse de souvenir et d’oubli, série de flash aspirés par une matière noire, un flou dans lequel il faut sans cesse tenter de poser des balises afin qu’il ne se transforme pas définitivement en chaos.


Combien ce livre a fait battre mon cœur: ❤️❤️❤️❤️
Commentaire spontané: En dévoilant son traumatisme d'enfance, l'auteur fait revivre une époque pas si lointaine où Auschwitz n'était pas encore la star des camps… Le ton est donné. Mais c'est avant tout le charme de l'enfance qui coule de ces lignes avec sa charge de candeur, d'interrogations et de violences. Si j'ai quelquefois ri (les bons mots saupoudrent le récit), j'ai aussi été bouleversée à bien des égards par cette histoire (l'âge des protagonistes, leur "procès", les non-dits familiaux, le silence qui a suivi l'événement, la solitude, etc.). A travers les réflexions de l'auteur, j'ai retrouvé des débats intérieurs qui m'ont moi-même agitée. Bref, vous l'aurez compris: conquise, je suis!

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