Aharon Appelfeld, 240 pages, bibliothèque de l'olivier
traduit de l'hébreu par Valérie Zenatti
De quoi s'agit-il?
Avec Histoire d'une vie, Aharon Appelfeld nous livre quelques-unes des clés qui permettent d'accéder à son œuvre : réminiscences de la petite enfance à Czernowitz, en Bucovine. Portraits de ses parents, des Juifs assimilés, et de ses grands-parents, un couple de paysans dont la spiritualité simple le marque à jamais. Il y a aussi ces scènes brèves, visions arrachées au cauchemar de l'extermination. Puis les années d'errance, l'arrivée en terre d'Israël, et le début de ce qui soutiendra désormais son travail : le silence, la contemplation, l'invention d'une langue approchant au plus près l'énigme d'une vie, les méandres de la mémoire, et le sens que l'art peut leur donner.
Traduit de l'hébreu et révisé pour la présente édition par Valérie ZenattiPrix Médicis étranger 2004Commentaire établi pour le cercle littéraire du CCJ de Montpellier:
Lire un livre d’Aharon Appelfeld,
c’est plonger dans une musicalité particulière qui va droit au cœur. Dans le
cadre de notre atelier littéraire, j’ai parcouru Histoire d’une vie pour la 3ème
fois, mais pour l’occasion, j’avais acquis une version tout juste parue. Dans
cette version révisée par sa traductrice, Valérie Zenatti, des mots, des
tournures de phrases apparaissent différentes, donnant un éclairage parfois
nouveau au texte, soulignant, lors d’une lecture comparée, l’importance de la
traduction dans la transmission.
Lors de cette lecture, j’ai
encore une fois été touchée par la vulnérabilité de l’enfance traversée par la
guerre. Bien que cette fois, il nous parle de sa propre vie, Ahahron Appelfeld
émaille son récit de souvenirs d’enfants croisés au hasard, des enfants que des
inconnus aidaient d’un morceau de pain ou d’un manteau – une condition
nécessaire, mais hélas pas suffisante pour s’en sortir pendant cette terrible
période.
J’ai aussi été frappée par
l’importance de la nature dans la vie de l’auteur, et par la relation intime
qu’il a nouée très tôt avec elle. Il faut dire qu’en l’absence de parents à un
âge où les apprentissages fondamentaux se font, la vie dans les bois n’a pu que
laisser une empreinte durable.
Enfin, je parlerai de cette
grande sidération qui est la mienne à chaque fois que je lis ces lignes (pages
120 et 121 de l’édition 2021) : « En quelques semaines, l’enfant de
sept ans entouré de chaleur et d’un immense amour devint un orphelin de mère
abandonné dans le ghetto, traîné par la suite avec son père dans une marche
forcée à travers les plaines d’Ukraine, au milieu des agonisants et des morts
étendus sur les bas-côtés de la route, trottant avec ses dernières forces
auprès de ceux, peu nombreux, qui marchaient encore. »
Il y aurait encore tant à dire
sur l’écriture et sur la langue, deux thèmes dont la construction et la
déconstruction sont au cœur du livre et de la vie de l’auteur - et qui ont bien
occupé nos débats ! Une chose est sûre, l’œuvre est foisonnante et chacun
peut y trouver son bonheur de lecteur.