vendredi 29 mars 2019

Le retour de la bête

Jean-Luc Marcastel, 144 pages, collection étincelles, Gulf Stream éditeur

Présentation de l'éditeur:

Mêlant la sombre période de la France occupée aux histoires de la Bête du Gévaudan, Jean-Luc Marcastel démontre avec talent que les monstres ne sont pas toujours des légendes. 

Il l'a entendue. Il dit même qu'il l'a vue, avec ses yeux petits et méchants. Mais au village tout le monde sait que le père Gustave boit un peu trop. Alors son histoire à dormir debout, qui ravive le souvenir de la fameuse Bête du Gévaudan, ça ne me fait pas peur, enfin presque pas... Et puis j'ai un problème plus urgent à traiter : organiser l'évasion de mon meilleur ami Maurice, qui a été arrêté par des SS. Mais comment moi et ma bande de copains, qu'une simple bête imaginaire effraie, pourrions- nous mettre en déroute les soldats allemands ?

Combien ce livre a fait battre mon cœur: abandon
Commentaire spontané: Un style assez lourd, trop éloigné de mes goûts; ça arrive, même en jeunesse.

mercredi 27 mars 2019

La tente d'en face

Pascal Ruter, 96 pages, Didier Jeunesse

Présentation de l'éditeur:

Cet été, au camping d’Arcachon, deux tentes se font face...
D’un côté, celle de Titus, toute tordue et mal montée. Il faut dire que son père, qui ressemble comme deux gouttes d’eau à Johnny Depp, n’est pas très bricoleur !
De l’autre, la tente de Bérénice, toujours impeccable et rangée.
Une rencontre qui va faire des étincelles !

Combien ce livre a fait battre mon cœur: ❤️❤️❤️❤️
Commentaire spontané: Une histoire loufoque à souhait! La construction  est hyper bien ficelée. Chaque mot est à sa place. Toutes les phrases font mouche. Belle réussite!

mardi 26 mars 2019

Un poisson sur la lune

David Vann, 288 pages, Gallmeister

Présentation de l'éditeur:

“Les gens seraient-ils en réalité tous au bord du suicide, toute leur vie, obligés de survivre à chaque journée en jouant aux cartes et en regardant la télé et en mangeant, tant de routines prévues pour éviter ces instants de face à face avec un soi-même qui n’existe pas ?” Tel est l’état d’esprit de James Vann lorsqu’il retrouve sa famille en Californie – ses parents, son frère cadet, son ex-femme et ses enfants. Tous s’inquiètent pour lui et veulent l’empêcher de commettre l’irréparable. Car James voyage avec son Magnum, bien décidé à passer à l’acte. Tour à tour, chacun essaie de le ramener à la raison, révélant en partie ses propres angoisses et faiblesses. Mais c’est James qui devra seul prendre la décision, guidé par des émotions terriblement humaines face au poids du passé, à la cruauté du présent et à l’incertitude de l’avenir.

David Vann revisite son histoire familiale et réussit une confession spectaculaire, mêlant subtilement réalité et fiction pour livrer une implacable réflexion sur ce qui nous fait tenir à la vie.


Combien ce livre a fait battre mon cœur:❤️❤️❤️
Commentaire spontané: Une histoire forte, intime, à lire jusqu'à la dernière ligne. Cependant, je n'ai pas réussi à y être aussi réceptive que le thème l'exigeait. Ce n'était pas le bon timing pour la lire, je crois. Cela arrive, surtout avec des sujets aussi durs.

jeudi 21 mars 2019

La fille sur le toit

Anne Loyer, collection Echos, Gulf Stream éditeur, 184 pages,

4ème de couverture:

- Axelle…
C'est tout ce qu'il trouve à dire. Un murmure, un son à peine audible… ridicule. Il ne me touche pas, il n'y arrive plus. C'était pourtant simple pour lui jusque là.

L'attirance est partagée, la relation charnelle et passionnée. Mais lorsque Axelle, 16 ans, comprend que son professeur de français considère cette aventure comme un dérapage et la chasse de sa vie, elle s'effondre. Le rejet incompréhensible d'une mère face au désespoir de sa fille va finir d'entraîner Axelle dans une spirale infernale. Silence, douleurs, lumière pâle, chambre vide, des mains douces qui prennent soin d'elle, une voix rassurante, puis c'est la sortie de l'hôpital. Seule face à cette nouvelle réalité en ruine, Axelle ne sait plus vers qui se tourner. Miette, son amie d'enfance, à qui elle a caché sa liaison? Eric, son père, artiste aux ambitions déçues et qu'Axelle connaît si peu? Rachel, sa tante, confidente de toujours? Qui?
Un roman chorale tout en délicatesse autour d'une histoire d'amour taboue.

Combien ce livre a fait battre mon cœur: ❤️❤️❤️❤️❤️
Commentaire spontané: La grande Anne a encore frappé! Avec un style percutant, incisif, rythmé, reconnaissable entre mille, elle met en scène une jeune fille écorchée. Les personnages secondaires ne le sont pas moins. C'est aussi ce qui fait la force de ce livre, car quand on croit avoir tout compris, Anne nous sort de sa plume un éclairage nouveau sur les événements. Une grande réussite. Bravo!

dimanche 17 mars 2019

Butcher's Crossing

John Williams, 336 pages, 10/18

Présentation de l'éditeur:

Dans les années 1870, persuadé que seule la nature peut donner un sens à sa vie, le jeune Will décide de quitter le confort de Harvard pour tenter la grande aventure dans l’Ouest sauvage. Parvenu à Butcher’s Crossing, une bourgade du Kansas, il se lie d’amitié avec un chasseur qui lui confie son secret : il est le seul à savoir où se trouve l’un des derniers troupeaux de bisons, caché dans une vallée inexplorée des montagnes du Colorado. Will accepte de participer à l’expédition, convaincu de toucher au but de sa quête. Le lent voyage, semé d’embûches, est éprouvant mais la vallée ressemble effectivement à un paradis. Jusqu’à ce que les deux hommes se retrouvent piégés par l’hiver…
« Butcher’s Crossing démonte le mythe du Grand Ouest américain avec une histoire de survie qui tourne à l’horreur. Un lyrisme superbe et tout en retenue. La prose simple et élégante de Williams est enfin reconnue à sa juste valeur. »
Bret Easton Ellis

Combien ce livre a fait battre mon cœur: ❤️❤️❤️❤️❤️
Commentaire spontané: Une histoire rude où tout tourne à l'excès: si les hommes y sont excessifs, la nature ne l'est pas moins. Ce roman est avant tout une éblouissante réflexion sur le pillage des ressources naturelles et sur ses effets ravageurs.

samedi 16 mars 2019

Guitel Pourishkevitsh et autres héros dépités

Sholem-Haleikhem, 160 pages, L'antilope

Présentation de l'éditeur:

Guitel Pourishkevitsh et autres héros dépités contient trois nouvelles de la série des monologues, forme que l’auteur affectionnait particulièrement.
Dans « Joseph », « Trois veuves » et « Guitel Pourishkevitsh », Sholem-Aleikhem propose une galerie de portraits truculents : anti-héros aux prises avec le développement du capitalisme et de la finance, l’embourgeoisement, l’émancipation des femmes, la sécularisation des enfants, mais aussi avec les luttes sociales qui menèrent à la révolution avortée de 1905. Il y règne une atmosphère tragi-comique et une extraordinaire autodérision.

Extrait des « Trois veuves »

Son nom, c’était Payè, mais on l’appelait « la jeune veuve ». Pourquoi ? Voilà que ça commence, les pourquoi ! Qu’est-ce que vous ne comprenez pas ? Sans doute que si on l’appelait la jeune veuve, c’est qu’elle était jeune et qu’elle était veuve. Figurez-vous que j’étais plus jeune qu’elle. De combien ? Qu’est-ce que ça peut vous faire ? Si je vous dis plus jeune, ça veut dire plus jeune.
Combien ce livre a fait battre mon cœur: ❤️❤️❤️❤️
Commentaire spontané: J'aime la façon si particulière que l'auteur a de nous apostropher. Les héros se retrouvent dans des situations vraiment dramatiques, quand on y pense bien, mais leurs aventures arrivent à être désopilantes par la seule force de la narration. Mention spéciale pour la traductrice qui nous livre une vraie jubilation littéraire.

mardi 12 mars 2019

Et Wolf fils de Hersh devint Willy

Israël Joshua Singer, 160 pages, L'antilope

Présentation de l'éditeur:

Ukraine, avant la Première Guerre mondiale. Wolf est très heureux sur le domaine de son père Hersh. Il préfère s’occuper du bétail et faire des promenades dans la campagne plutôt que d’étudier.
Quand il rentre du service militaire, son père a vendu le domaine pour s’installer dans la bourgade voisine.
Par dépit, Wolf part pour l’Amérique. Débarqué à New York, il ne se fait pas à la vie urbaine. Il s’installe alors chez un paysan protestant et sa fille Esther. Tout en se rapprochant d’Esther, il découvre le mode de vie protestant, austère. C’est ainsi qu’il devient Willy.

Déjà connu pour ses talents de narrateur, Israël Joshua Singer ose ici aborder un tabou du judaïsme traditionnel : l’union mixte..



Extrait du roman


« Après le repas, le vieux s’installait dans un fauteuil, et demandait à sa fille de lire la Bible. Wolf n’était pas dépaysé. Les histoires des Patriarches, des Hébreux en Égypte persécutés par Pharaon… lui rappelaient ses années d’enfance, quand il étudiait la Torah avec son maître. Cette fille goy aux cheveux raides qui lisait l’histoire des Hébreux, d’Abraham, d’Isaac, de Jacob, tout cela l’emplissait de fierté.
– Nice stories ! De belles histoires ! disait le vieux. Tu connais ?
 »
Combien ce livre a fait battre mon cœur: ❤️❤️❤️❤️❤️
Commentaire spontané: Après Printemps et autres saisons publié également chez L'antilope, quel bonheur de retrouver cet auteur et son art de raconter les histoires! Bien des thèmes sont abordés dans ce court roman: conflit des générations, rapport au père, poids des traditions, exil, mariage mixte, mais celui qui a le plus retenu mon attention est la difficulté de s'extraire de sa communauté. Malgré un nouveau pays, un nouveau nom, un nouveau mode de vie, le passé du héros le rattrape comme une fatalité.

lundi 11 mars 2019

Des jours sans fin

Sebastian Barry, Joëlle Losfeld éditions, 272 pages

Présentation de l'éditeur:

Chassé de son pays d’origine par la Grande Famine, Thomas McNulty, un jeune émigré irlandais, vient tenter sa chance en Amérique. Sa destinée se liera à celle de John Cole, l’ami et amour de sa vie.
Dans le récit de Thomas, la violence de l’Histoire se fait profondément ressentir dans le corps humain, livré à la faim, au froid et parfois à une peur abjecte. Tour à tour Thomas et John combattent les Indiens des grandes plaines de l’Ouest, se travestissent en femmes pour des spectacles, et s’engagent du côté de l’Union dans la guerre de Sécession.
Malgré la violence de ces fresques se dessine cependant le portrait d’une famille aussi étrange que touchante, composée de ce couple inséparable, de Winona leur fille adoptive sioux bien-aimée et du vieux poète noir McSweny comme grand-père. Sebastian Barry offre dans ce roman une réflexion sur ce qui vaut la peine d’être vécu dans une existence souvent âpre et quelquefois entrecoupée d’un bonheur qui donne l’impression que le jour sera sans fin.

Combien ce livre a fait battre mon cœur: ❤️❤️❤️❤️
Commentaire spontané: Beaucoup de batailles dans cet ouvrage qui est loin de se résumer à un livre de guerre, au contraire. Pour moi, il s'agit avant tout d'une merveilleuse histoire d'amour et de liberté, qu'entravent l'indigence et l'esprit étriqué d'une époque où les indiens sont des ennemis à abattre et où les noirs sont pendus sans autre forme de procès dans les états sudistes. La langue très imagée est un vrai bonheur de lecture.

dimanche 10 mars 2019

Une bouche sans personne

Gilles Marchand, 264 pages, Points

Présentation des Forges de Vulcain:

Un comptable se réfugie la journée dans ses chiffres et la nuit dans un bar où il retrouve depuis dix ans les mêmes amis. Le visage protégé par une écharpe, on ne sait rien de son passé. Pourtant, un soir, il est obligé de se dévoiler. Tous découvrent qu’il a été défiguré. Par qui, par quoi? Il commence à raconter son histoire à ses amis et à quelques habitués présents ce soir-là. Il recommence le soir suivant. Et le soir d’après. Et encore. Chaque fois, les clients du café sont plus nombreux et écoutent son histoire comme s’ils assistaient à un véritable spectacle. Et, lui qui s’accrochait à ses habitudes pour mieux s’oublier, voit ses certitudes se fissurer et son quotidien se dérégler. Il jette un nouveau regard sur sa vie professionnelle et la vie de son immeuble qui semblent tout droit sortis de l’esprit fantasque de ce grand-père qui l’avait jusque-là si bien protégé du traumatisme de son enfance.
Léger et aérien en apparence, ce roman déverrouille sans que l’on y prenne garde les portes de la mémoire. On y trouve les Beatles, la vie étroite d’un comptable enfermé dans son bureau, une jolie serveuse, un tunnel de sacs poubelle, des musiciens tziganes, une correspondance d’outre-tombe, un grand-père rêveur et des souvenirs que l’on chasse mais qui reviennent. Un livre sur l’amitié, sur l’histoire et ce que l’on décide d’en faire. Riche des échos de Vian, Gary ou Pérec, lorgnant vers le réalisme magique, le roman d’un homme qui se souvient et survit – et devient l’incarnation d’une nation qui survit aux traumatismes de l’Histoire.

Combien ce livre a fait battre mon cœur: ❤️❤️❤️❤️
Commentaire spontané: Une histoire qui m'a fait penser au monde fantasmagorique de Boris Vian, et qui cache une vérité bien réelle et douloureuse. Mention spéciale pour les scènes à la boulangerie. Beaucoup d'humour, d'imagination, une belle plume. Très réussi.

dimanche 3 mars 2019

Donne-moi encore cinq minutes

Donne-moi encore cinq minutes, Yoanatan Berg, L'antilope, 512 pages

Présentation de l'éditeur:

Bnaya et Yoav ont grandi dans la même colonie juive de Cisjordanie. Devenu adulte, Bnaya l’habite toujours au moment où le gouvernement israélien ordonne son démantèlement. Yoav l’a quittée après avoir vécu un drame pendant son service militaire. Il mène une existence laïque à Tel-Aviv.
Les deux amis peuvent-ils se retrouver ?

Extrait du roman

« Quelques années après que Rachel et moi nous sommes installés ici, c’était au milieu des années quatre-vingt, j’ai commencé à faire du footing autour de l’Implantation. Pas pour ma santé, ou en tout cas pas uniquement pour ma santé. C’était aussi une façon d’afficher notre présence. Je voulais qu’on nous voie, qu’on nous voie vraiment.  »
Combien ce livre a fait battre mon cœur: ❤️❤️❤️
Commentaire spontané: Une plongée passionnante dans un univers méconnu: celui des colonies juives de Cisjordanie. Tensions, espoirs, désillusions, doutes, passions y sont exacerbés. Une lecture qui m'a captivée de façon exponentielle au fil des pages. Un témoignage fort sur la jeunesse israélienne confrontée à la peur permanente, et qui apprend à vivre avec ses démons.
Une phrase du livre qui m'a frappée:
Il sait reconnaître l'origine des véhicules sans même regarder les plaques d'immatriculation et, s'il lui arrive parfois de se crisper, les sens aux aguets, ce n'est pas de peur, non, non, rien qu'un petit coup au ventre dès qu'une voiture palestinienne arrive sur sa gauche et le double.